Le Bangladesh fait ses adieux à l'ex-Première ministre Khaleda Zia
Une foule immense a commencé mercredi à se rassembler dans Dacca pour assister aux funérailles nationales de l'ancienne Première ministre Khaleda Zia, personnalité qui a marqué la vie politique du Bangladesh pendant quarante ans.
Les drapeaux ont été mis en berne au lendemain du décès à 80 ans de la première femme à avoir exercé les fonctions de Première ministre dans cette nation d’Asie du Sud de 170 millions d'habitants.
Des milliers d'agents des forces de l'ordre ont été déployés le long des rues empruntées par le véhicule aux couleurs du drapeau national transportant son corps.
Minhaz Uddin, 70 ans, un haut fonctionnaire retraité, explique n'avoir jamais voté pour elle mais avoir tenu à rendre hommage à celle qui fut trois fois Première ministre.
"Je suis venu avec mon petit-fils pour dire adieu à une grande figure de la vie politique, dont les contributions resteront à jamais dans les mémoires", a-t-il confié, derrière une barricade surmontée de fil barbelé.
Malgré sa santé défaillante, Mme Zia avait annoncé son intention de mener la campagne du Parti nationaliste du Bangladesh (BNP) pour les premières législatives depuis le soulèvement populaire de l'été 2024 et de briguer un siège au Parlement.
Elle avait été propulsée à la tête du BNP après l'assassinat de son mari Ziaur Rahman pendant le coup d'Etat militaire de 1981.
"Elle n'est plus là, mais son héritage demeure — et le BNP aussi", a confié Jenny Parvez, 37 ans, qui a fait plusieurs heures de trajet pour assister au passage du cortège funéraire.
Tarique Rahman, fils de Mme Zia et président par intérim du BNP, est rentré au Bangladesh le 25 décembre pour conduire la campagne électorale, après 17 ans d'un exil volontaire au Royaume‑Uni.
A 60 ans, il est pressenti pour prendre la tête du gouvernement en cas de victoire de son parti, donné favori pour le scrutin du 12 février 2026.
Le chef du gouvernement provisoire et prix Nobel de la paix Muhammad Yunus a décrété trois jours de deuil national.
- "Une grande protectrice" -
Les funérailles commenceront vers 14H00 (08H00 GMT) par une prière collective devant le Parlement.
L'ex-cheffe du gouvernement sera ensuite inhumée aux côtés de son mari.
Le pays "a perdu une grande protectrice", a déclaré dans un communiqué M. Yunus, saluant "son leadership inflexible" qui a, "à plusieurs reprises, libéré la nation de conditions antidémocratiques et inspiré le peuple à viser la liberté".
"Le pays pleure la perte d'une figure tutélaire qui a façonné ses aspirations démocratiques", a déclaré son fils dans un communiqué.
Il a dit pleurer également la perte de "l'amour infini" de sa mère, qui "a enduré des arrestations à répétition, le refus de soins médicaux et une persécution incessante".
"Et pourtant, dans la douleur, la détention et l'incertitude, elle n'a jamais cessé de protéger sa famille avec courage et compassion. Sa résilienc (...) était indestructible".
Gravement malade, Khaleda Zia avait été admise fin novembre dans le service de soins intensifs d'un établissement privé de Dacca pour une infection pulmonaire.
- "Une source d'inspiration" -
Sa santé était fragile depuis son incarcération pour corruption en 2018, sous le règne de sa grande rivale Sheikh Hasina qui a dirigé le pays d'une main de fer pendant 15 ans jusqu'à la chute de son régime en août 2024. Mme Zia avait été libérée quelques mois après.
Le Premier ministre indien Narendra Modi a dit espérer que "sa vision et son héritage continueront de guider notre relation".
Des déclarations inattendues dans le contexte des relations très tendues entre ces deux pays voisins.
L'Inde était l'un des principaux soutiens de l'ex-Première ministre qui vit, depuis sa chute, en exil sur son territoire .
Le ministre indien des Affaires extérieures, Subrahmanyam Jaishankar, se rendra à Dacca pour assister aux funérailles, a indiqué New Delhi.
Des hauts responsables pakistanais devraient également y assister.
"Je prie pour la paix éternelle et le pardon de l'âme de Begum Khaleda Zia", a réagi Mme Hasina, 78 ans, dans un message diffusé sur les réseaux sociaux par son parti, la Ligue Awami, désormais illégal.
En novembre dernier, elle a été condamnée à mort par contumace pour avoir ordonné la répression meurtrière des manifestations de l'été 2024.
C.Ursini--LDdC